Luc Brunet – 2 Juillet 2023
J’évite généralement d’écrire sur des événements qui se développent encore. Aujourd’hui sera une exception, vu à la situation actuelle en France et en Europe occidentale.
Tout d’abord, laissez-moi vous rappeler un article que j’ai écrit en 2020, intitulé ‘Les trois France ennemies’
En quelques mots, cet article décrit les tensions entre trois groupes de la société française :
- les élites et le groupe woke évoluant autour d’eux, croyant souvent à tort qu’ils sont eux-mêmes des élites (appelés bobos en 2020, mais le terme woke est plus international)
- le groupe de marginalisés comprenant principalement des migrants de longue date, mais marginalisés, ou des nouveaux venus (appelé groupe des migrants en 2020, mais ce terme n’etait pas completement correct)
- le groupe majoritaire de citoyens, dont beaucoup vivent en dehors des grandes villes, incluant beaucoup de migrants bien intégrés
Comme expliqué dans mon article de 2020, je considère que les groupes marginalisés et woke sont associés aujourd’hui, bien que cela puisse changer à l’avenir. La raison en est que le groupe des marginalisés tire ses revenus des élites, qu’il s’agisse d’allocations sociales ou d’argent en échange de drogues. Mais en dehors de l’argent, rien n’unit les wokes et les marginalisés. Ils se détestent profondément, bien que de nombreux wokes prétendent le contraire, du moins jusqu’à ce que leur propre voiture soit incendiée.
Ce que nous voyons aujourd’hui, ce sont des marginalisés en mode hystérique et violent. Mais cette violence n’est jusqu’à présent pas une menace pour les élites. La violence que nous voyons maintenant est une forme de shopping-thérapie pour compenser leur frustration et leur rage après que l’un d’entre eux ait été tué. La dernière fois, c’était à cause d’un match de football. Il n’y a rien de politique dans ce qu’ils font. Ils veulent juste détruire et consommer (le pillage est une forme de consommation). Ils détruisent d’ailleurs essentiellement des équipements et des lieux qui font partie de leur propre communauté et de la communauté de la majorité.
Tout ce qui est détruit maintenant n’est pas un problème pour les wokes qui vivent en paix loin des banlieues, et encore moins pour les élites qui peuvent même y voir une opportunité de business pour la reconstruction à venir.
Plusieurs détails confirment cela, par exemple que les événements se sont maintenant propagés à d’autres pays, où Macron n’a aucun impact, ou que le véritable centre du pouvoir à Paris est intact, et je parle ici du triangle Monceau-Neuilly-Porte de St Cloud . De même, aucun symbole du pouvoir de l’élite n’est attaqué, comme la télévision, la radio, la presse, les ministères, etc. Il est vrai que des mairies ou autres bâtiments publics sont attaqués dans les petites villes, mais ce ne sont pas des symboles du pouvoir de l’élite, et font partie de l’écosystème des majoritaires.
Tout cela explique selon moi le faible niveau de réaction et de peur du côté du gouvernement français et des élites françaises. Ils étaient beaucoup plus effrayés et mal à l’aise au début du mouvement des gilets jaunes il y a quelques années, qui était politiquement motivé et soutenu par des millions de personnes.
Je suppose que l’élite considère les violences actuelles comme un moyen d’augmenter les tensions entre les groupes dans la société et comme une excuse pour une censure sévère d’Internet, quelque chose dont ils parlent depuis des années.
Comment la situation évoluera est difficile à deviner, mais les marginalisés, s’ils ne sont pas provoqués trop violemment, continueront quelques jours, puis commenceront à s’ennuyer, ne sachant que faire de ce qu’ils ont volé, et la paix reviendra jusqu’au prochain événement, peut être un match de football à nouveau. Ce qui restera, c’est une censure beaucoup plus forte d’Internet.
Je ne vois aucune synergie entre les marginalisés et la majorité car ils sont fondamentalement incompatibles. Mais plus de violence peut provenir d’un événement inattendu. Nous devons comprendre que de nombreuses armes lourdes ont été vendues en Ukraine au cours des 16 derniers mois et que certaines d’entre elles peuvent être utilisées à la place de feux d’artifice, et que l’armée pourait alors intervenir, invitée ou non par l’élite.
Mais c’est une autre histoire.
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Prenez soin de vous!
Bonjour Luc
Ton analyse de 2020 reviistée en 2023 est intéressante et assez juste, mais un peu imprécise.
1. Les élites économiques du pays, les grands riches adeptes de l’éco-libéralisme, sont en fait très divisées entre bobos (que tu décris très bien) et bonobos, un terme popularisé par les humoristes. Les bobos sont de gauche, proches (mais pas tous) du mouvement woke, et très internationalistes. Les Macronistes sont des bobos. Les bonobos sont proches des valeurs traditionnelles, c’est à dire catholiques (mêmes’ils ne pratiquent pas). Les notions de Nation et de Patrie ont du sens à leurs yeux. Bolloré, les Républicains, Zemmour sont à ranger dans cette catégorie. Les Bonobos ne sont pas les alliés objectifs des migrants, ni aujourd’hui, ni demain.
2. Les migrants non intégrés sont à diviser entre migrants musulmans ex-colonisés (de loin les plus nombreux) et les autres. Ce groupe inclut les générations successives depuis la migration, qui ne se sont pas intégrées. Les migrants musulmans ex-colonisés refusent la laïcité (et donc la république) et cultivent une haine de la France renforcée par leur passé de colonisé. Ils n’ont pas de conscience politique, même si Mélenchon essaie pathétiquement de les draguer.
3. Les Majoritaires sont divisés en deux groupes. Le plus important vote RN : pas hostile au libéralisme, mais méfiant. Plutôt proche des valeurs traditionnelles, le genre c’est pas leur truc. Et peu internationalistes, car ils voyagent peu hors de France. Plutôt « français de souche » et cocardiers. Le moins important est le groupe insoumis /écolo rouge : clairement hostile au libéralisme, clairement réceptif au mouvement « woke », et ayant jeté la nation depuis longtemps aux orties. Ce groupe est en déclin malgré la « qualité » de son chef. Le groupe majoritaire RN est clairement hostile aux migrants. Le groupe Insoumis les cajole mais se fera égorger par eux le moment venu car ils n’ont rien en commun.
A cette analyse un peu plus précise doit s’ajouter plusieurs constats en ces temps d’émeutes :
1. la société est très fortement fracturée. Plus qu’elle ne l’a jamais été.
2. Nous n’avons ni les lois, ni les juges, ni le président requis pour traiter ces fractures : l’excuse de minorité est une absurdité, les juges sont laxistes et sans moyens, le Président est hors sol.
3. Les bobos commencent à prendre peur, je le vois autour de moi. La pression monte pour qu’on pénalise les consommateurs de drogues (voir l’affaire du bobo Palmade). Les migrants vont venir brûler leurs quartiers tôt ou tard. On va en voir de plus en plus émigrer.
4. La police est devenue raciste par la force des choses car les 3/4 des délinquants qu’elle arrête sont des migrants, lesquels sont relâchés ensuite par la justice. Si on la pousse à bout, je n’exclus pas qu’on la voie manifester ou exercer son droit de retrait.
5. Dans ces conditions Macron n’a d’autre choix que de réduire drastiquement l’immigration africaine, défendre sa police et pratiquer une répression ciblée sur les émeutiers, faute de quoi son quinquennat s’achèvera dans le chaos et son successeur viendra du RN. Il y sera contraint par les candidats à sa succession venant de son entourage.
Merci Claude pour ces commentaires et les complements que tu nous apportes. Loin de France, je n’avais pas entendu parler du terme de Bonobos..